24 novembre 2024 | 03:05
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Observations sur le projet de SCOT dans le cadre de l’enquête publique

Le projet de SCOT ne prévoit que deux objectifs chiffrés :

  • la consommation de 195 ha de terres aujourd’hui non artificialisées ; 
  • la construction de 38.000 logements par an jusqu’en 2035 soit 570.000 logements permettant d’accueillir 750.000 nouveaux habitants.

Ces deux points appellent à plusieurs observations :

  • La consommation de 195 ha est impensable alors qu’il est recensé actuellement plus de 2 700 friches en Île-de-France dont près de 800 à Paris et en petite couronne qui totalisent une superficie de 4 200 ha. Cette occupation urbaine va à l’encontre de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de la région et ne respecte pas le Zéro Artificialisation Net (ZAN).

    Le projet de SCOT doit flécher l’artificialisation de ces 195 ha sur des friches déjà existantes.
  • Ce projet ne semble être rédigé que pour permettre l’arrivée de 750.000 habitants supplémentaires alors même que les franciliens vivent dans une densité déjà trop importante, en supportant une pollution qui engendre de plus en plus de problèmes de santé, et font face à des modes de transports saturés que le Grand Paris ne parvient déjà pas à soulager.

    Ainsi, plutôt qu’à souhaiter une augmentation de la densité, ce projet devrait s’attacher à améliorer les conditions de vie des franciliens déjà présents.
  • l’objectif de construction de 38.000 logements par an ne prend pas en compte les gisements immobiliers existants : les logements vacants qui devrait être les premiers à être mobilisés (+ de 200.000 logements en IDF), puis les immeubles de bureaux à transformer en habitation, pour enfin, et accessoirement, se porter sur la construction neuve. De plus l’accueil de 750.000 habitants nécessitant la construction de 570.000 logements, le projet envisage, en raisonnant dans l’absolu, moins de 2 habitants par logement.
  • Si des objectifs sont chiffrés pour l’artificialisation et la création de logements alors ils devraient l’être aussi pour les îlots de fraîcheur à créer, les mètres carrés à désartificialiser, les friches à utiliser (l’expropriation pour motif d’intérêt général pourrait être mise en oeuvre systématiquement pour ce faire), les zones humides à recréer, etc. Or, on constate ici un déséquilibre qui doit être rectifié : soit en réduisant notablement l’objectif chiffré de 580.000 logements, soit en intégrant des chiffres pour les actions favorables à l’environnement.

S’agissant des points devant être intégrer dans le projet de SCOT :

  • la recherche d’une meilleure qualité des sols répondant à la stratégie de protection des sols que la commission européenne a établi à horizon 2030 afin de retrouver des sols en bonne santé d’ici 2050.

    En effet, dans une communication récente, la commission européenne estime qu’environ 60 à 70 % des sols de l’Union européenne sont en mauvaise santé. Les terres et les sols continuent à subir d’importantes dégradations par des processus tels que l’érosion, le tassement, la diminution de la teneur en matière organique, la pollution, le déclin de la biodiversité, la salinisation et l’imperméabilisation. Ces dommages résultent d’une utilisation et d’une gestion non durables des terres, ainsi que de leur surexploitation et des émissions de polluants.

    Or, les sols et la multitude d’organismes qu’ils abritent sont notre source de nourriture, de biomasse, de fibres et de matières premières. Ils régulent le cycle de l’eau, du carbone et des nutriments et rendent possible la vie sur terre.

    Ces sols abritent plus de 25 % de la biodiversité de la planète et constituent le premier maillon de la chaîne alimentaire qui nourrit l’humanité et la biodiversité vivant en surface. Cette couche fragile devra pouvoir nourrir et filtrer l’eau pour satisfaire les besoins de près de 10 milliards de personnes sur terre d’ici à 2050.

    De même, lorsqu’ils sont en bonne santé, les sols constituent le plus grand réservoir de carbone terrestre de la planète. Cette qualité, associée au rôle d’éponge qu’ils jouent en absorbant l’eau, réduisant ainsi les risques d’inondation et de sécheresse, fait d’eux un allié indispensable dans l’atténuation du changement climatique. Les sols en bonne santé participent donc aux objectifs de l’Union en matière de climat et de biodiversité (ainsi qu’à ses objectifs économiques à long terme). Objectifs qu’on retrouve notamment dans la loi climat et résilience du 21 août 2021.

    Dès lors, le projet en n’intégrant pas les objectifs d’amélioration des sols est d’ores et déjà obsolète avec 15 ans de retard en ne tenant pas compte des directives de la commission européenne. Le projet de SCOT doit donc absolument reprendre ces objectifs d’amélioration de la qualité des sols.
  • la végétalisation étant notre meilleure arme afin de lutter contre les canicules, il est nécessaire que le SCOT pousse plus loin les démarches engagées et soit visionnaire. Des prescriptions claires de création d’îlots de fraîcheur dans les espaces déjà existants doivent être prises, les espaces qui ne peuvent plus être utilisés, tels que les espaces vigipirates devant les écoles doivent être végétalisés, les trottoirs doivent intégrer des espaces de pleine terre de façon extensive, etc. Les solutions existent, le SCOT peut et se doit de les mettre en œuvre !

    Dans le même esprit, le revêtement des voiries doit être amélioré afin que celui-ci crée le moins possible d’îlots de chaleur et réduise au maximum la pollution sonore.
  • favoriser le commerce dit présentiel en intégrant comme objectif de rendre premium les centres-villes notamment par la piétonisation. En refaire des lieux de promenade, de rencontres et d’échanges tout en faisant nos courses, plutôt qu’un simple lieu de passage obligé pour accéder aux commerces
  • intégrer dans la notion d’aménagement, le concept d’urbanisme relationnel, c’est-à-dire permettant aux habitants de créer du lien social, avec des équipements tels que les places ombragées, les parcs entretenues, les bancs confortables, les parvis des écoles, les zones commerçantes, les halles alimentaires, les salles polyvalentes, etc.

    Cet objectif essentiel au “vivre ensemble”, permet de créer des expériences de vie commune, du “faire ensemble”, de provoquer les échanges, de découvrir l’autre, bref de nous rendre heureux.

    L’urbanisation ne peut pas n’être que fonctionnelle, sinon elle se fera au détriment de notre santé mentale provoquant stress et besoin de fuir un territoire qui n’est plus accueillant.
  • travailler les éclairages afin de tendre vers de vraies trames noires. Aujourd’hui, les lumières pullulent. Sous prétexte que la technologie des leds est utilisée, beaucoup (collectivités, commerces et habitants) font un usage abusif de la lumière au détriment de la santé mentale des habitants causée par la pollution lumineuse et de la biodiversité qui fuit ces zones où les équilibres diurnes et nocturnes ne sont plus respectés.

    Les objectifs d’interdiction de l’utilisation de panneaux de publicité lumineux doivent être intégrés ainsi que la réduction drastiques des éclairages dits d’esthétisme dès lors que le site éclairé ne présente pas un intérêt touristique exceptionnel (tour Eiffel ou château de Versailles par exemple).
  • la réouverture du ruisseau de la Fontaine du Moulin à Fontenay-aux-Roses doit être intégré à la prescription n°95 du DOO ainsi que la préservation des drains Colbert.
  • une interdiction de création de fontaines artificielles, coûteuses pour un résultat parfois esthétiquement contestable et souvent abandonnées quelques années après leur création (ex. fontaine du creuset-du-temps, place de Catalogne dans le 14ème), pourrait être opportune afin que soit privilégiée la réouverture de ruisseaux et la mise en valeur des résurgences de sources. Cette démarche permettra de favoriser la biodiversité qui pourra s’y abreuver et évitera des équipements coûteux et destructeurs de l’environnement.
  • la création d’un véritable maillage de pistes cyclables afin de faire du vélo l’égal de la voiture. En effet, la mise en œuvre d’une politique cycliste ambitieuse est la clé permettant un désengorgement des voies routières, l’allègement de la fréquentation des transports en commun mais aussi un abaissement des émissions de polluants lesquels entraînent des milliers de décès prématurés par an, souvent du fait de cancers. L’enjeu de cette mesure est telle qu’elle ne peut pas être vue comme une politique résiduelle de transport, elle est LA solution de transport. La mise en œuvre d’un plan vélo ambitieux permettra au final de laisser la place sur les voies routières et dans les transports aux personnes qui ont réellement besoin de les utiliser. De plus, l’utilisation du vélo entraîne une très faible dégradation des enrobés des voies, et donc une baisse de l’entretien de celles-ci entraînant une réduction du coût de leur entretien. 
  • fixer des objectifs de création de places de crèches et/ou de maisons d’assistants maternels par seuils de création de logement : par exemple 10 berceaux dès lors que 100 logements sont créés. Ainsi pour rentre plus attrayant notre territoire et qu’il soit performant économiquement, il est nécessaire que les enfants de 0 à 3 ans puissent être gardés sans que cela ne pénalise un parent (la femme dans 98% des cas).
  • Enfin, améliorer la qualité du RER B est un objectif essentiel. Ces dernières années, la ligne du RER B s’est grandement détériorée, nuisant ainsi  à la qualité de vie de ses usagers. La création d’autres lignes ne doit pas avoir pour impact de faire du RER B, la ligne sinistrée du réseau RATP.

Pour conclure, l’adage “gouverner, c’est prévoir” semble avoir été le grand oublié de ce projet de SCOT. En effet, il n’est que le reflet de discussions politiciennes à court terme et sans vision de l’objectif qu’il devrait poursuivre : prévoir l’aménagement de la région afin que tous les franciliens puissent y vivre décemment et dans un environnement sain.

Léa-Iris POGGI
lea.poggi.fontenay@gmail.com

1 RÉPONSE

  • Le Scot se grandirait en interdisant le béton comme matériau de construction. La production de ciment/béton est l’industrie la plus polluante. Le béton (production, transport, utilisation) représente 10% des émissions de CO2

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