Sacrés marronniers – place de Gaulle !
Lettre ouverte à l’intention de la Commission chargée du réaménagement de la place du Général de Gaulle
Mesdames, Messieurs,
Si je m’adresse aujourd’hui à la Commission municipale en charge de la réflexion autour du réaménagement annoncé de la place du Général de Gaulle, c’est en qualité de riverain de cette même place depuis plus de trente ans.
Soyez assuré que mon propos d’aujourd’hui est seulement guidé par la défense du cadre de vie en centre-ville, plus particulièrement son cœur de “village”: la place du Général de Gaulle.
Plusieurs constats s’imposent:
o le projet avorté de 1992 a suffisamment marqué les esprits pour qu’il soit régulièrement rappelé aux Conseils municipaux, où chacun s’accorde à répéter qu’il s’agit d’un point sensible typiquement fontenaisien, doux euphémisme,
o à de nombreuses reprises, à la fois en campagne électorale et aux Conseils municipaux, les édiles successifs ont pris l’engagement de ne plus toucher aux “arbres sacrés” de la “montagne sacrée” de Fontenay,
o mais aucun n’a résisté à l’envie plutôt qu’à la nécessité d’amputer les alignements tantôt pour un arrêt de bus, tantôt pour un kiosque, quand un peu de concertation aurait permis de retenir d’autres solutions plus respectueuses du site et des fameux alignements,
o en effet, l’alignement d’arbres de la place du Général de Gaulle est une composante urbanistique majeure de la Commune, lui conférant un esprit ‘village’ que les candidats aux élections municipales ont tous souligné, prenant en compte le désir exprimé par les fontenaisiens de préserver leur cadre de vie privilégié,
o cette originalité urbanistique devenue rare et même exceptionnelle en région parisienne et tout particulièrement en petite couronne mériterait assurément d’être classée au titre du patrimoine urbain remarquable,
o c’est la direction qui avait été prise pendant plusieurs décennies, en inscrivant la place sous la protection bien modeste mais ô combien symbolique des ‘Espaces Boisés Classés’,
o tel n’est plus le cas depuis le PLU de mars 2017, alors qu’aucune demande de changement de statut de la place n’avait pourtant été formulée par les administrés ou les associations locales,
o on le voit, la place du Général de Gaulle s’inscrit au carrefour d’enjeux pas seulement floristiques, mais également urbanistiques,
D’un point de vue urbanistique, la place du Général de Gaulle se caractérise non seulement par ses proportions, les bâtiments qui l’entourent mais aussi et tout particulièrement par les alignements d’arbres qui en font la singularité. Qu’ils soient en bonne forme ou pas, les marronniers participent encore aujourd’hui à l’agrément des usagers par leur seule présence, les troncs, leur circonférence, leur couleur, leur grain et leur rythme, tout autant que leur ramure, l’ombrage, les fleurs, les grappes de marrons, les fruits tombés au sol, les feuilles aux couleurs changeantes, jusqu’aux feuilles au sol en automne. Loin de moi l’envie de décrire un paysage bucolique: chacun de ces items fait manifestement le bonheur réel des fontenaisiens, restés sensibles aux changements de saisons, aux marrons glanés par les enfants, à la seule présence de ces vénérables ancêtres ligneux. L’agrément qui paraît évident au printemps et en été, se prolonge en hiver par le nombre et le rythme des troncs à hauteur de regard. Tel ne sera plus le cas si un arbre sur deux est supprimé, comme cela est envisagé nous dit-on au Conseil municipal.
Parce que la “messe n’est pas dite”, parce que les alignements de la place constituent un élément et un symbole urbanistique fort du centre-ville, j’insiste à nouveau: je ne doute pas que ces caractéristiques essentielles seront prises en compte par le groupe de travail constitué à l’initiative de la municipalité. Pour ces raisons, il serait pertinent de s’associer le concours d’un urbaniste qualifié.
En effet, l’état d’avancement du dossier évoqué en Conseil municipal faisait seulement état de la préoccupation louable mais décalée de l’ONF, de voir prospérer des sujets enfin placés dans des conditions optimales. Si telle est la préoccupation légitime des pépiniéristes et des exploitants forestiers en milieu ouvert, tel n’est pas l’objet en milieu urbain lorsqu’il s’agit d’alignement. Le propos consiste alors à trouver des essences qui s’accommodent au mieux de la pollution ambiante, du terrain ingrat et son manque de perméabilité, des usagers et des dégradations, des contraintes de la taille etc. On s’intéresse alors à l’alignement et pas aux individus, à l’agrément des usagers et moins celui des arbres. C’est un compromis dans lequel la rotation des sujets est programmée et acceptée.
Le postulat d’une redynamisation par réduction de moitié du nombre de sujets est mis à mal puisque les arbres abattus et non-remplacés n’ont pas permis de constater d’embellie des arbres alentour.
Dans cette même hypothèse, lorsque sera venu le temps de remplacer les moins bien-portants, le vide sera davantage pénalisant et perceptible que dans la situation actuelle. Et que dire de l’aspect mité et miteux de l’alignement si deux sujets espacés contigus venaient à être abattus par nécessité…
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Cet alignement planté en 1877 a résisté à deux guerres mondiales alors que le bois de chauffage manquait pourtant cruellement: franchira-il les deux prochaines années ?
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Si elle est prorogée dans une continuité maîtrisée, compromis entre exigences urbanistiques et souhaits floristiques, la situation actuelle nécessitera qu’un vrai calendrier d’entretien et de renouvellement programmé sur plusieurs mandatures soit instauré, contrepied de l’attentisme et du laisser-aller des dernières décennies.
Ces différents points ont déjà été évoqués avec d’autres riverains, sans savoir s’ils ont été fidèlement transmis jusqu’à la Commission comme cela avait été convenu. C’est maintenant chose faite.
Je vous remercie de votre attention, et vous prie de croire, Mesdames, Messieurs, à l’assurance de mes sentiments distingués.
Olivier SASSOT
1 RÉPONSE
Pourtant déposé en mairie, ce courrier est resté sans réponse.
L’alignement de 1877 est désormais à terre, les fontenaisiens auraient donc pu se chauffer en 1940, la protection Espace Boisé Classé a fait son temps, les recours contre le PLU sont encore à l’instruction, la concertation n’a jamais eu lieu, la plupart des marronniers a été abattue en janvier 2019, la particularité urbanistique singulière de Fontenay-aux-Roses est désormais réduite en petit bois et les fontenaisiens sont dépités.
Olivier SASSOT
Fontenaisien depuis 30 ans